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MOR

nombre de personnages contemporains, et enfin la relation de faits curieux observés pendant ses voyages. Il ne quittait son cabinet que pour se rendre très-exactement aux séances des sociétés savantes et littéraires dont il était membre, et où il était sur de rencontrer d’anciens amis. Il avait contracté des dettes pendant sa longue disgrâce, et l’impossibilité de les acquitter troublait son repos. Le roi, dont Moreau avait eu l’honneur d’être connu avant la révolution et qui lui savait gré du zèle avec lequel il avait servi Louis XVI en 1789, fut informé de sa mauvaise fortune ; il daigna le faire appeler en 1817, et après l’avoir comblé de bonté, lui fit remettre quinze mille francs. Cette somme suffit pour apaiser ses créanciers et pour répandre quelque aisance dans sa famille. Tant d’adversités avaient affaibli sa santé. Il mourut le 28 janvier 1819, âgé de 69 ans. Son éloge fut prononcé sur sa tombe par l’auteur de cet article. Il a été imprimé par l’ordre de la société d’agriculture, dont Moreau était membre. M. Sylvestre, secrétaire perpétuel de cette compagnie, y lut dans la même année un éloge historique de Moreau. Voici la liste de ses principaux ouvrages : 1° Lois et constitution : des colonies françaises de l’Amérique sous le Vent, de 1550 à 1785, Paris, 1784-1790, 6 vol. in-4o. Louis XVI ordonna qu’un exemplaire de cet ouvrage serait déposé dans chaque bureau d’administration et dans chaque greffe des colonies américaines ; il est devenu très-rare. 2° Description de la partie espagnole de St-Domingue, Philadelphie, 1796, 2 vol. in 8° ; 3° Idée générale ou abrégée des sciences et des arts, à l’usage de la jeunesse, ibid., 1795, in-12. Ce livre élémentaire, imité de celui que Formey avait publié en 1754, est infiniment supérieur à son modèle ; il a été traduit en anglais et adopté comme classique dans les colléges des États-Unis. 4° Relation de l’ambassade de la compagnie des Indes orientales hollandaise : à la Chine, rédigée par Van Braam, traduite en français, ibid., 1796-1797, 2 vol. in-4o. La traduction de Moreau a été traduite en anglais et publiée à Londres. Le même ouvrage a ensuite été réimprimé à Paris en français. 5° Description de la partie française de la colonie de St-Domingue, Philadelphie, 1797-1798, 2 vol. in-4o. Cet ouvrage, ainsi que celui qui renferme la description de la partie espagnole, contient des notions étendues et importantes sur l’agriculture des Antilles, sur l’industrie et le commerce, sur l’histoire physique et naturelle, sur les usages anciens et modernes des peuples de ces contrées. 6° De la danse, ibid., 1797, in-12, et Parme, Bodoni, 1801, in-16. L’auteur, dans ce morceau écrit avec beaucoup de grâce et de feu, montre l’analogie qui existe entre les danses coloniales et celles des Maures, des Africains et surtout celles des Grecs. 7° Discours sur l’utilité du musée de Paris, prononcé le jour de inauguration de cette société en 1784, Parme, 1805, in-Ir ; 8° Discours sur les assemblées publiques littéraires, prononcé au muséum de Paris en 1785, Parme, 1805, in-4o Les principaux manuscrits qu’a laissés Moreau de St-Méry sont : 1° Histoire générale des Antilles française. Ce manuscrit, susceptible de former plusieurs volumes, était son ouvrage de prédilection ; il a travaillé à le perfectionner jusqu’à ses derniers moments. Il est rempli de faits curieux et ignorés, tant historiques que biographiques, et particuliers aux mœurs et a l’origine des premiers naturels. 2° Répertoire de notions coloniales. Celui-ci doit former aussi plusieurs volumes ; il est entièrement destiné à recueillir des anecdotes et des faits historiques sur les premiers fondateurs des colonies et sur les indigènes, indiens et Caraïbes. Il renferme les lois coloniales inédites, dont la rédaction lui avait été confiée par le gouvernement, d’après ses représentations sur divers abus. 3° Description de la Jamaïque ; 4° Histoire de Porto-Rico ; 5° Observations sur le climat, l’histoire naturelle, les mœurs et le commerce des États-Unis d’Amérique ; 6° Matériau : d’un traité général sur les cultures coloniales ; 7° Histoire des États de Parme, Plaisance et Guastalla. Cet ouvrage renferme sur cette partie de l’Italie des détails fort intéressants relativement aux mœurs et à la politique. 8° La Vie de l’auteur, écrite par lui-même. Moreau de St-Méry a traduit, sur le manuscrit espagnol de don F. Azara, l’Histoire naturelle des quadrupèdes du Paraguay, Paris, 1800, 2 vol. in-8o. Le traducteur y ajouta un grand nombre de notes instructives, et son travail fut approuvé par l’Institut. Cet écrivain a publié un grand nombre d’articles historiques, littéraires et scientifiques, et de mémoires, soit séparément, soit dans différents recueils. Desessarts a recueilli plusieurs de ses factums dans le Journal des causes célèbres. F-R.


MOREAUX (Jean-Rami), général en chef de l’armée de la Moselle, et confondu par un grand nombre d’historiens modernes avec son presque homonyme Victor Moreau, est né à Rocroy (Ardennes), le 14 mars 1758, d’une famille appartenant à l’industrie. Une vocation précoce le poussa vers l’état militaire. À dix-sept ans, il s’engagea dans les grenadiers d’Auxerrois, et y connut Jourdan, avec qui il fit la campagne d’Amérique. À l’affaire de Ste-Lucie, Moreaux eut la jambe droite fracassée d’une balle et rentra en France en 1782. Remis de sa blessure avec le temps, instruit et beau soldat, il fut nommé par le suffrage de ses concitoyens commandant de la garde nationale de Rocroy. Mais vint le jour où voulant étouffer la révolution, l’ennemi, confiant et nombreux, apparut à nos frontières. Un décret du 22 juillet 1791, portant sur vingt-six départements, mobilisa 97,000 hommes des gardes nationales. Moreaux, appelé au commandement en second du 1er bataillon des Ardennes, abandonna son industrie, embrassa sa femme et ses quatre enfants en bas âge et partit avec ses vo-