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BIOGRAPHIE UNIVERSELLE
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T

TARABOLOUS (Ali-Pacha, surnommé) parce qu’il était de Tripoli, fut fait grand vizir par Achmet II, en 1693. Son ministère fut signalé par la prise de Scio, dont les Vénitiens s’emparèrent, et par le pillage de la caravane de la Mecque, fait par les Arabes. À la mort d’Achmet, Tarabolous-Ali, qui n’avait ni moyens ni adresse, crut, à l’exemple de quelques-uns de ses prédécesseurs, pouvoir placer sur le trône un souverain de son chaux. Il prétendait y élever Ibrahim, fils d’Achmet, prince âgé seulement de trois ans, sous le nom duquel il espérait gouverner ; il était appuyé dans ses vues et son ambition par le muphti. Leur plan n’eut pas de succès ; et tous deux furent forcés de se prosterner aux pieds de Mustapha II, lors de sa proclamation, en 1695 Le nouveau souverain dissimula son ressentiment mais, dès la même année, le muphti fut déposé et le grand vizir Tarabolous étranglé, sous prétexte de malversation. Il ne laissa que la réputation d’un fripon et d’un ambitieux maladroit.

S—y.


TARABOTII (Arcangela), religieuse vénitienne, était née à Venise, dans la première moitié du 17e siècle. On a peu de détails sur elle ; mais on suppose qu’elle eut de l’esprit et de Vinstruction. Elle est auteur de deux ouvrages, dont l’un ne nous est connu que par son titre, ainsi rapporté par Haym : Difesa della donne, contra Orazio Plata, Noremberga, 1651, in-16. Plata, à l’imitation d’Acidialus (voy. ce nom), ou peut-être en le traduisant, avait donné au public : Discorso piacevole che le donne non sieno della specie degli uomini, Lione, 1647, aussi in-16. L’autre ouvrage d’Arcangela a paru sous le pseudonyme de Galerana Baratotti[1] ; il est intitulé La simplicità ingannate, Leida, Gio. Sambix, 1654, petit in-12. Ce joli volume, de douze feuillets préliminaires, titre compris, et de trois cent sept pages, imprimé par les Elzevir, est tout à fait digne de la collection de ces célèbres imprimeurs ; aussi il est très-recherché et ne se rencontre pas facilement. L’ouvrage curieux qu’il renferme n’est point un roman, comme le dit, sûrement par inadvertance, le premier de nos bibliographes[2]. C’est une déclamation contre les parents qui forcent leurs filles à se faire religieuses, et en même temps une apologie du beau sexe, un vrai plaidoyer pour les femmes contre les hommes. C’est à Dieu (a Dio) qu’Arcangela a dédié son livre, dont la pensée est résumée par ces deux vers placés au commencement :

La divozion forzata
Al Signore non è grata

Il ne faut y chercher ni un plan bien suivi, ni un ordre bien régulier dans la disposition des deux sujets, qu’elle mène de front avec une certaine adresse, mais sans éviter les répétitions un peu trop fréquentes. À cela près, il est intéressant, écrit avec chaleur et quelquefois avec éloquence ; il respire la candeur et la franchise ; en un mot, on le lit d’un bout à l’autre avec plaisir. Arcangela avait une grande érudition, bien qu’elle dise être jeune et n’avoir étudié que pour son agrément. Elle cite à propos les auteurs sacrés et profanes, anciens et modernes, la Bible et les Pères, puis les philosophes de l’antiquité, enfin les poëtes. Elle cite aussi presque toutes les femmes célèbres. Ce qu’elle dit des couvents est très-hardi pour l’époque où elle vivait, pour le pays qu’elle habitait, et surtout dans la bouche d’une religieuse ; C’est pourquoi, outre le déguisement de son nom, pour mieux se cacher encore, elle se dit séculière et déclare ne savoir que par ouï-dire et par des relations ce qui se passe dans les cloitres (p. 59). Elle promettait (p. 307} un autre ouvrage dans lequel elle devait peindre, avec plus de détail, les tourments et le désespoir des infortunées qu’on fait entrer malgré elles dans ces prisons, que la religieuse de Ste-Anne compare souvent à l’enfer. Nous ne savons pas si elle a tenu parole.

B—l—u.


TARAFAH (Amrou ben Alabad) est l’auteur de l’un des sept poëmes arabes connus Sous le nom de Moallakah[3]. Livré aux plaisirs et à la poésie,

  1. Le premier, si l’on en croit Haym, était sous celui de Galerana Barcinotti.
  2. Voy. le Manuel du libraire, au mot Baratotti.
  3. Si l’on en croit une note tirée d’un manuscrit des Moallakahs, qui est dans la bibliothèque du duc de Saxe-Gotha, ce nom de Moallakhas (suspendus) vient, non point, comme on dit, de ce que ces poëmes ont été suspendus à la porte de la Caaba, mais de ce que les Arabes, en entendant réciter un morceau de poésie d’un mérite supérieur, décriaient, dans leur admiration : Alla kon hou (attachez-le!), c’est-à-dire gravez-le dans votre mémoire. (Journal des Savants, 1820, p. 279 et 280.) C. M. P.