Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 1.djvu/96

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à fond sa politique et son caractère, mais il me semble que rien n’est plus-facile que d’apprécier ses embarras. Nous avons vu souvent en France des gouvernemens provisoires, et vous savez ce qu’ils ont fait ; qu’est-ce en effet qu’une autorité qui n’existait pas hier, et qui n’existera pas demain ? qu’est-ce qu’un président qui attend un monarque ? une république qu’on organise en attendant une royauté ? aujourd’hui une espèce de royaume sans roi ? bientôt un roi sans royaume ? On refuse au président de la Grèce les qualités d’un homme d’état ; mais un homme d’état ne réussirait pas davantage. Je pense que la position de Capo-Distrias, position qu’il n’a point choisie, l’a jeté dans le discrédit où il est tombé, et dans l’impossibilité de gouverner et d’agir ; encore plus que les fautes qu’il a pu commettre. Il n’y a rien de pire en politique qu’un état de choses qu’on croit constitué et qui ne l’est pas du tout ; l’établissement d’une autorité précaire a trompé à la fois l’Europe et la Grèce, a pu tromper le président lui-même : on ne songe point à faire ce qu’on croit déjà fait. Ainsi peut-être a-t-on perdu, pour organiser ce malheureux pays, les seuls momens qui décident du sort des révolutions et de la destinée des peuples ! On suppose au président un caractère dissimulé, un pareil reproche s’adresse d’ordinaire à tous-ceux que les circonstances ont placés dans une position fausse, et que la faveur populaire a tout à fait abandonnés.