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COMME JADIS…

frileux. Et puis viendront les oies sauvages qui déchirent la nuit d’un long cri de souffrance… Oui, j’attends le retour des choses qui marquent les étapes de ma vie et me rendent ma personnalité.


J’en prends l’habitude : j’ai laissé dormir ce commencement de lettre. Je vous l’envoie néanmoins.

Ah ! l’amitié merveilleuse que me révèle votre chère lettre, sous trois enveloppes, écrite de Nantes. Je voudrais répondre de toutes mes confiances à toutes vos confiances.

Je lirai votre conférence. Que vous ayez parlé en poète de mon pays, je n’en suis pas surprise. Je vous remercie de l’avoir fait mieux connaître et un peu aimé. Après l’avoir lu, je vous dirai sincèrement mon opinion sur votre travail. Ce soir, je voudrais vous parler seulement de cette rencontre qui me paraît tellement prodigieuse, sortie d’un chapitre de roman. Mon trouble, mon émoi, à la simple évocation de cette image, me permet d’imaginer votre trouble, votre émoi… Quand vous lirez ces lignes, peut-être vos chemins se seront-ils de nouveau croisés…

Gérard, sa présence ce soir-là, ce besoin de vous revoir, de vous entendre, sa fuite devant votre attitude calme, presque dédaigneuse, tout cela m’a secouée d’un grand doute. J’en suis ébranlée. Si