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MONDE GERMANIQUE.


« Clovis avait établi sa demeure à Soissons. Ce prince trouvait un grand plaisir dans la compagnie et les entretiens de saint Rémi ; mais, comme le saint homme n’avait dans le voisinage de la ville d’autre habitation qu’un petit bien qui avait autrefois été donné à saint Nicaise, le roi offrit à saint Rémi de lui donner tout le terrain qu’il pourrait parcourir pendant que lui-même ferait sa méridienne, cédant en cela à la prière de la reine et à la demande des habitants qui se plaignaient d’être surchargés d’exactions et contributions, et qui, pour cette raison, aimaient mieux payer à l’église de Reims qu’au roi. Le bienheureux saint Rémi se mit donc en chemin, et l’on voit encore aujourd’hui les traces de son passage et les limites qu’il marqua. Chemin faisant, un meunier repoussa le saint homme, ne voulant pas que son moulin fut renfermé dans l’enceinte. « Mon ami, lui dit avec douceur l’homme de Dieu, ne trouve pas mauvais que nous possédions ensemble ce moulin. » Celui-ci l’ayant refusé de nouveau, aussitôt la roue du moulin se mit à tourner à rebours, lors le meunier de courir après saint Rémi et de s’écrier : « Viens, serviteur de Dieu, et possédons ensemble ce moulin. — Non, répondit le saint, il ne sera ni à toi, ni à moi. » La terre se déroba aussitôt, et un tel abîme s’ouvrit, que jamais depuis il n’a été possible d’y établir un moulin.

« De même encore, le saint passant auprès d’un petit bois, ceux à qui il appartenait l’empêchaient de le comprendre dans son domaine : « Eh bien ! dit-il, que jamais feuille ne vole ni branche ne tombe de ce bois dans mon clos. » Ce qui a été en effet observé