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CARLOVINGIENS.

que la terre reste eu pâturage[1]. L’esclavage, adouci il est vrai, s’étend et gagne rapidement. Charlemagne gratifie son maître Alcuin d’une ferme de vingt mille esclaves. Chaque jour les grands forcent les pauvres à se donner à eux, corps et biens ; le servage est un asile où l’homme libre se réfugie chaque jour.

Aucun génie législatif n’eût pu arrêter la société sur la pente rapide où elle descendait. Charlemagne ne fit que confirmer les lois barbares. « Lorsqu’il eut pris le nom d’empereur, dit Éginhard, il eut l’idée de remplir les lacunes que présentaient les lois, de les corriger, et d’y mettre de l’accord et de l’harmonie. Mais il ne fit qu’y ajouter quelques articles, et encore imparfaits. »

Les capitulaires sont en général des lois administratives, des ordonnances civiles et ecclésiastiques. On y trouve, il est vrai, une partie législative assez considérable, qui semble destinée à remplir ces lacunes dont parle Éginhard. Mais peut-être ces actes, qui portent tous le nom de Charlemagne, ne font-ils que reproduire les capitulaires des anciens rois Francs. Il est peu probable que les Pépin, que Clotaire II et Dagobert, aient laissé si peu de capitulaires ; que Brunehaut, Frédégonde, Ébroin, n’en aient point laissé. Il en sera advenu pour Charlemagne ce qui serait advenu à Justinien, si tous les monuments antérieurs du droit romain avaient péri. Le compilateur eût passé

  1. Un bœuf, ou six boisseaux de froment, valaient deux sous ; cinq bœufs, ou une robe simple, ou trente boisseaux, dix sous, six bœufs, ou une cuirasse, ou trente-six boisseaux, douze sous (M. Desmichels).