Page:Michelet - La femme.djvu/160

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tait levée demoiselle. Plus légère, et pourtant moins vive, elle ne méritait plus le nom que lui donnait sa mère : « Mon oiseau ! mon papillon ! »

Son premier soin, en revoyant son jardin, changé comme elle, et tellement embelli, ce fut d’y prendre quelques fleurs pour son père et pour sa mère qui l’avaient soignée, gâtée, encore plus qu’à l’ordinaire. Elle les rejoignit souriante, avec son petit hommage. Elle les trouva tout attendris, ne se disant rien l’un à l’autre, muets d’une même pensée.

Pour la première fois peut-être depuis bien longtemps ils la mirent entre eux. Quand elle était toute petite et apprenait à marcher, sans être tenue, elle avait besoin de les voir ainsi à portée de droite et de gauche. Mais ici, devenue grande, et presque autant que sa mère, elle sentit bien doucement que c’étaient eux maintenant qui avaient besoin de l’avoir entre eux. Ils l’enveloppaient de leur cœur, et d’un amour si ému, que sa mère avait quelque peine à s’empêcher de pleurer.

« Chère maman ! qu’avez-vous donc ? » Et elle se pendit à son cou. Sa mère l’accablait de caresses, mais ne lui répondait pas, craignant que son cœur n’échappât. Enfin, un peu affermie, quoique une larme charmante lui noyât encore les yeux, la mère dit en souriant : « Je racontais à ton père ce que j’ai rêvé cette nuit. Tu étais seule au jardin, tu