Page:Michelet - La femme.djvu/215

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dans les climats plus secs de l’Afrique centrale. L’affreuse anarchie de petites guerres et la traite qui désolent les côtes ne contribuent pas peu à cette laideur, et elle est la même dans les colonies d’Amérique avec l’abrutissement de l’esclavage.




Là même où elle reste négresse et ne peut affiner ses traits, la noire est très-belle de corps. Elle a un charme de jeunesse suave que n’eut pas la beauté grecque, créée par la gymnastique, et toujours un peu masculinisée. Elle pourrait mépriser non-seulement l’odieuse Hermaphrodite, mais la musculeuse beauté de la Vénus accroupie (V. au Jardin des Tuileries). La noire est bien autrement femme que les fières citoyennes grecques ; elle est essentiellement jeune, de sang, de cœur et de corps, douce d’humilité enfantine, jamais sûre de plaire, prête à tout faire pour déplaire moins. Nulle exigence pénible ne lasse son obéissance. Inquiète de son visage, elle n’est nullement rassurée par ses formes accomplies de morbidesse touchante et de fraîcheur élastique. Elle prosterne à vos pieds ce qu’on allait adorer. Elle tremble et demande grâce ; elle est si reconnaissante des voluptés qu’elle