Page:Michelet - La femme.djvu/262

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Vous seuls en Europe ignorez que, si l’on ne vous habille en soldats, vous êtes le peuple sédentaire, le peuple prudent. Vous traînez où vous naquîtes ; mais on périt fort bien sur place, dans votre vie de loterie, dans vos tempêtes de bourse, et l’huître même y fait naufrage. Voilà votre stabilité, voilà les positions sûres pour lesquelles le mariage s’ajourne jusqu’à l’âge mûr, jusqu’à l’âge où la plupart, finis, n’ont plus que faire d’amour.




La Gaule et la vieille France furent le pays de l’espoir. On se fiait à l’avenir et on le faisait. On aimait, on épousait jeune. À l’âge où ceux-ci, éreintés, font une fin et prennent femme, on avait déjà depuis longtemps maison, famille et postérité.

Les enfants ne vivaient pas tous. Cependant ce peuple gai, amoureux et prolifique, a mis partout trace de soi. Nos Gaulois, aux temps anciens, avaient fait je ne sais combien de peuples en Europe et en Asie. Nos croisés du douzième siècle créèrent nombre de colonies. Nos Français du seizième et du dix-septième, par leur énergie, leur sociabilité facile, conquéraient le nouveau monde, et francisaient les sauvages. Qui arrêta cela ? Uniquement Louis XIV, qui, attaquant la Hollande, la