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MÉROVINGIENS

bénédiction. Or, en ce moment, Pepin séjournait au village de Gernicourt ; et, ayant appris de l’évêque que cette demeure lui plaisait, il la lui offrit, ajoutant qu’il lui donnerait en outre tout le terrain dont il pourrait faire le tour tandis qu’il reposerait à l’heure de midi. Rigobert, suivant donc l’exemple de saint Remi, se mit en route et fit poser de distance en distance les limites qui se voient encore aujourd’hui, et traça ainsi l’enceinte pour obvier à toute contestation. À son réveil, Pepin, le trouvant de retour, lui confirma la donation de tout le terrain qu’il venait d’enclore ; et pour indice mémorable du chemin qu’il a suivi, on y voit, en toute saison, l’herbe plus riche et plus verte qu’en aucun autre lieu d’alentour. Il est encore un autre miracle non moins digne d’attention que le Seigneur se plaît à opérer sur ces terres, sans doute en vue des mérites de son serviteur : c’est que, depuis la concession faite au saint évêque, jamais tempête ni grêle ne fait dommage en son domaine ; et, tandis que tous les lieux d’alentour sont battus et ravagés, l’orage s’arrête aux limites de l’Église, sans jamais oser les franchir[1]. »

Ainsi tout favorisait l’absorption de la société par l’Église, tout y entrait, Romains et barbares, serfs et libres, hommes et terres, tout se réfugiait au sein maternel. L’Église améliorait tout ce qu’elle recevait du dehors ; mais elle ne pouvait le faire sans se détériorer d’autant elle-même. Avec les richesses l’esprit du monde entrait dans le clergé, avec la puissance,

  1. Flodoard.