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CARLOVINGIENS

le Nord, jusqu’en Poitou, jusqu’en Bourgogne[1], confiante dans sa légèreté et dans la vigueur infatigable de ses chevaux africains. La célérité prodigieuse de ces brigands, qui voltigeaient partout, semblait les multiplier ; ils commençaient à passer en plus grand nombre : on craignait que, selon leur usage, après avoir fait un désert d’une partie des contrées du Midi, ils ne finissent par s’y établir. Eudes, défait une fois par eux, s’adressa aux Francs eux-mêmes ; une rencontre eut lieu près de Poitiers entre les rapides cavaliers de l’Afrique et les lourds bataillons des Francs (732), Les premiers, après avoir éprouvé qu’ils ne pouvaient rien contre un ennemi redoutable par sa force et sa masse, se retirèrent pendant la nuit. Quelle perte les Arabes purent-ils éprouver, c’est ce qu’on ne saurait dire. Cette rencontre solennelle des hommes du Nord et du Midi a frappé l’imagination des chroniqueurs de l’époque ; ils ont supposé que ce choc de deux races n’avait pu avoir lieu qu’avec un immense massacre[2]. Charles-Martel poussa jusqu’en Languedoc, il assiégea inutilement Narbonne, entra dans Nîmes et essaya de brûler les Arènes qu’on avait changées en forteresse. On distingue encore sur les murs la trace de l’incendie.

Mais ce n’est pas du côté du Midi qu’il dut avoir le plus d’affaires ; l’invasion germanique était bien plus à craindre que celle des Sarrasins. Ceux-ci étaient éta-

  1. En 725, ils prirent Carcassonne, reçurent Nîmes à composition, et détruisirent Autun. En 731, ils brûlèrent l’église de Saint-Hilaire de Poitiers.
  2. App. 110.