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DISSOLUTION DE L’EMPIRE CARLOVINGIEN

C’est une loi de l’histoire : un monde qui finit, se ferme et s’expie par un saint. Le plus pur de la race en porte les fautes, l’innocent est puni. Son crime, à l’innocent, c’est de continuer un ordre condamné à périr, c’est de couvrir de sa vertu une vieille injustice qui pèse au monde. À travers la vertu d’un homme, l’injustice sociale est frappée. Les moyens sont odieux ; contre Louis-le-Débonnaire, ce fut le parricide. Ses enfants couvrirent de leurs noms les nations diverses qui voulaient s’arracher de l’Empire.

L’infortuné qui vient prêter sa vie à cette immolation d’un monde social, qu’il s’appelle Louis-le-Débonnaire, Charles Ier, ou Louis XVI, n’est pas pourtant toujours exempt de tout reproche. Sa catastrophe toucherait moins s’il était au-dessus de l’homme. Non, c’est un homme de chair et de sang comme nous, une âme douce, un esprit faible, voulant le bien, faisant parfois le mal, livré à ce qui l’entoure et vendu par les siens.


Le saint Louis du neuvième siècle[1], comme celui du treizième, fut nourri dans les pensées de la croisade. Jeune encore, il conduisit plusieurs expéditions contre les Sarrasins d’Espagne, et leur reprit la grande ville de Barcelone après un siège de deux ans. Élevé par le Toulousain saint Guillaume, comme saint Louis par Blanche de Castille, il eut de même dans la religion la ferveur du Midi et la candeur du Nord.

  1. App. 147.