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DISSOLUTION DE L’EMPIRE CARLOVINGIEN

ses deux prédécesseurs[1], si l’on en juge par sa conduite, se rendait un compte exact des difficultés de sa position, et ne négligeait aucun moyen de les vaincre. En 983, profitant de la mort d’Othon II et de la minorité de son fils, il rompit subitement la paix qu’il avait conclue avec l’Empire, et envahit de rechef la Lorraine, agression qui devait lui rendre un peu de popularité. Aussi, jusqu’à la fin du règne de Lothaire, aucune rébellion déclarée ne s’éleva contre lui. Mais chaque jour son pouvoir allait en décroissant ; l’autorité, qui se retirait de lui, pour ainsi dire, passa tout entière aux mains du fils de Hugues-le-Grand, Hugues, comte de l’Île-de-France et d’Anjou, qu’on surnommait Capet ou Chapet, dans la langue française du temps. « Lothaire n’est roi que de nom, écrivait dans une de ses lettres l’un des personnages les plus distingués du dixième siècle[2] ; Hugues n’en porte pas le titre, mais il l’est en fait et en œuvres. »

Les difficultés de tout genre que présentait en 987 une quatrième restauration des Carlovingiens effrayè-

  1. Nous remarquerons, à l’occasion de cette observation de M. Thierry, que les Carlovingiens, dans leur dégénération, ne tombèrent pas si bas que les Mérovingiens. Si Louis-le-Bègue fut surnommé Nihil-fecit, il faut se souvenir qu’il ne régna que dix-huit mois ; et les Annales de Metz vantent sa douceur et son équité. — Louis III et Carloman remportèrent une victoire sur les Northmans (879). — Charles-le-Sot fit avec eux un traité fort utile (911). Il battit son rival le roi Robert, et le tua, dit-on, de sa main. — Louis-d’Outre-mer montra un courage et une activité qui n’auraient pas dû lui attirer cette satire : « Dominus in convivio, rex in cubiculo. » — Enfin, suivant l’observation de D. Vaissette, la jeunesse de Louis-le-Fainéant lui-même, la brièveté de son règne, et la valeur dont il fit preuve au siège de Reims, ne méritaient pas ce surnom des derniers Mérovingiens.
  2. Gerbert.