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PHILIPPE-LE-BEL. — BONIFACE VIII

de 1300, il parut, au milieu de cette multitude de toute nation, avec les insignes impériaux ; il fit porter devant lui l’épée et le sceptre sur la boule du monde, et un héraut allait criant : « Il y a ici deux épées ; Pierre, tu vois ici ton successeur ; et vous, ô Christ ! regardez votre vicaire. » Il expliquait ainsi les deux épées qui se trouvèrent dans le lieu où Jésus-Christ fit la Cène avec ses apôtres.

Cette outrecuidance pontificale devait perpétuer la guerre des deux puissances, ecclésiastique et civile. La lutte qui semblait finie avec la maison de Souabe, est reprise par celle de France. Guerre d’idées, non de personnes, de nécessité, non de volonté. Le pieux Louis IX la commence, le sacrilège Philippe IV la continue.

« Reconnaître deux puissances et deux principes, dit Boniface dans sa bulle Unam sanctam, c’est être hérétique et manichéen… » Mais le monde du moyen âge est manichéen, il mourra tel ; toujours il sentira en lui la lutte des deux principes. — Que cherches-tu ? — La paix. C’est le mot du monde. L’homme est double ; il y a en lui le Pape et l’Empereur[1].

La paix ! Elle est dans l’harmonie, sans doute ; mais, d’âge en âge, on l’a cherchée dans l’unité. Dès le second siècle, saint Irénée écrit contre les Gnostiques son livre : De l’unité du principe du monde : De Monarchia. C’est encore le titre de Dante : De Monarchia : De l’unité du monde social[2].

  1. App. 13.
  2. App. 14.