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HISTOIRE DE FRANCE

prêtres ». Il disait souvent à Charles V que les rois étaient des sots d’avoir si bien renté les gens d’Église. Jamais il ne communiait. Railleur, blasphémateur, fort débauché, malgré ses soixante ans, il était bien avec les juifs, mieux avec les juives ; il leur rendait leurs enfants, qu’on enlevait pour les baptiser. Ce fut ce qui le perdit. L’Université l’accusa devant l’évêque. Un siècle plus tôt, il eût été brûlé. Il en fut quitte pour l’amende honorable et la pénitence perpétuelle, qui ne dura guère.

Abolir les impôts établis depuis Philippe-le-Bel, c’eût été supprimer le gouvernement. Par deux fois, le duc d’Anjou essaya de les rétablir (octobre 1381, mars 1382). À la seconde tentative, il prit de grandes précautions. Il fit mettre les recettes à l’encan, mais à huis clos dans l’enceinte du Châtelet. Il y avait des gens assez hardis pour acheter, personne qui osât crier le rétablissement des impôts. Pourtant, à force d’argent, on trouva un homme déterminé, qui vint à cheval dans la halle, et cria d’abord, pour amasser la foule : « Argenterie du roi volée ! Récompense à qui la rendra ! » Puis, quand tout le monde écouta, il piqua des deux, en criant que le lendemain on aurait à payer l’impôt.

Le lendemain, un des collecteurs se hasarda à demander un sol à une femme qui vendait du cresson[1] ; il fut assommé. L’alarme fut si terrible, que l’évêque, les principaux bourgeois, le prévôt même

  1. Religieux de Saint-Denis.