Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 4.djvu/220

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
212
HISTOIRE DE FRANCE

panem doloris. Sa femme, qui était une bonne et dévote dame, lorsqu’il s’éveilla, lui dit : « Mon ami, j’ai entendu ce matin qu’on vous disait, ou que vous prononciez en rêvant des paroles que j’ai souvent lues dans mes Heures », et elle les lui répéta. Le bon Juvénal lui répondit : « Ma mie, nous avons onze enfants, et par conséquent grand sujet de prier Dieu de nous accorder la paix ; ayons espoir en lui, il nous aidera. »

La ruine des bouchers fut décidée par une chose, petite, et pourtant de grand effet. Il fut convenu, malgré eux, que les propositions des princes seraient lues d’abord, non dans l’assemblée générale, mais dans chaque quartier (21 juillet). La faible minorité qui tyrannisait Paris pouvait effrayer encore, quand elle était réunie ; divisée, elle devenait impuissante, presque imperceptible. Ce point fut emporté contre les bouchers par l’énergie d’un quartenier du cimetière Saint-Jean, le charpentier Guillaume Cirasse, qui osa bien dire en face aux Legoix : « Nous verrons s’il y a à Paris autant de frappeurs de cognée que d’assommeurs de bœufs. »

Les bouchers n’obtinrent pas même que la paix accordée aux princes le fût sous forme d’amnistie. Quoi qu’ils pussent dire, on criait : « La paix ! » Ce parti vint finir à la Grève même. Dans une assemblée qui s’y tint, une voix cria : « Que ceux qui veulent la paix passent à droite ! » Il ne resta presque personne à gauche. Ils n’eurent d’autre ressource, eux et le duc de Bourgogne, que de se joindre au cortège du dau-