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RÉFORME DANS L’ÉTAT ET DANS L’ÉGLISE

c’était reconnaître comme supérieure l’autorité qui imposait la cession, c’était subordonner la papauté au concile, changer le gouvernement de l’Église de monarchie en république. Était-ce bien au milieu d’un ébranlement universel du monde qu’il pouvait toucher à l’unité qui, si longtemps, avait fait la force du grand édifice spirituel, la clef de la voûte ? Au moment où la critique touchait à la légende législative de la papauté, lorsque Valla élevait les premiers doutes sur l’authenticité des décrétales[1], pouvait-on demander au pape d’aider à son abaissement, de se tuer de ses propres mains ?

Il faut le dire. Ce n’était pas une question de forme, mais bien de fond et de vie. Monarchie ou république, l’Église eût été également malade. Le concile avait-il en lui la vie morale qui manquait au pape ? les réformateurs valaient-ils mieux que le réformé ? le chef était gâté, mais les membres étaient-ils sains ? Non, il y avait, dans les uns et dans les autres, beaucoup de corruption ; tout ce qui constituait le pouvoir spirituel tendait à se matérialiser, à n’être plus spirituel. Et cela venait principalement, nous l’avons dit, de l’absence des idées, du vide immense qui se trouvait dans les esprits.

C’en était fait de la scolastique. Raimond Lulle l’avait fermée par sa machine à penser ; puis Ockam en refusant la réalité aux universaux, en replaçant la question au point où l’avait laissée Abailard.

    il dit avec beaucoup de dignité : « Qu’importe ? saint Pierre n’avait pas ce royaume dans son obédience. »

  1. App. 154.