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HISTOIRE DE FRANCE

princes l’étaient en rose. On ne voyait aux fenêtres que belles filles vêtues d’écarlate avec des ceintures d’or. Le lait et le vin coulaient des fontaines ; des musiciens jouaient à chaque porte que passait la reine. Aux carrefours, des enfants représentaient de pieux mystères. La reine suivit la rue Saint-Denis. Deux anges descendirent par une corde, lui posèrent sur la tête une couronne d’or en chantant :

Dame enclose entre fleurs de lis,
Êtes-vous pas du paradis ?

Lorsqu’elle fut arrivée au pont Notre-Dame, on vit avec étonnement un homme descendre, deux flambeaux à la main, par une corde tendue des tours de la cathédrale.

Le roi avait pris tout comme un autre sa part de la fête ; il s’était mêlé à la foule des bourgeois, pour voir aussi passer sa belle jeune Allemande. Il reçut même des sergents « plus d’un horion » pour avoir approché trop près ; le soir, il s’en vanta aux dames[1]. Le prince débonnaire, sachant aussi qu’il y avait à la fête beaucoup d’étrangers qui regrettaient de n’avoir jamais vu jouter le roi, se mêla aux joutes pour leur faire plaisir.

Bientôt après, le jeune frère du roi, le duc d’Orléans, épousa la fille de Visconti, le riche duc de Milan[2].

  1. « En eut le roy plusieurs coups et horions sur les espaules bien assez. Et au soir, en la présence des dames et damoiselles, fut la chose sçue et récitée, et le roy mesme se farçoit des horions qu’il avoit reçus. » (Grandes chroniques de Saint-Denis.)
  2. Ce mariage eut de grandes conséquences qu’on verra plus tard. Elle apporta Asti en dot, avec 450,000 florins. (Archives.)