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PROCÈS ET MORT DE LA PUCELLE

elle avait dit : « Il me faut employer ; je ne durerai qu’un an, ou guère plus. » Plusieurs fois, s’adressant à son chapelain, frère Pasquerel, elle répéta : « S’il faut que je meure bientôt, dites de ma part au roi, notre seigneur, qu’il fonde des chapelles où l’on prie pour le salut de ceux qui seront morts pour la défense du royaume[1]. »

Ses parents lui ayant demandé, quand ils la revirent à Reims, si elle n’avait donc peur de rien : « Je ne crains rien, dit-elle, que la trahison[2]. »

Souvent, à l’approche du soir, quand elle était en campagne, s’il se trouvait là quelque église, surtout de moines Mendiants, elle y entrait volontiers et se mêlait avec les petits enfants qu’on préparait à la communion. Si l’on en croit une ancienne chronique, le jour même qu’elle devait être prise, elle alla communier à l’église Saint-Jacques de Compiègne, elle s’appuya tristement contre un des piliers, et dit aux bonnes gens et aux enfants qui étaient là en grand nombre : « Mes bons amis et mes chers enfants, je vous le dis avec assurance, il y a un homme qui m’a vendue ; je suis trahie et bientôt je serai livrée à la mort. Priez Dieu pour moi, je vous supplie ; car je ne pourrai plus servir mon roi et le noble royaume de France. »

Il est probable que la Pucelle fut marchandée, achetée, comme on venait d’acheter Soissons. Les Anglais en auraient donné tout l’or du monde, dans

  1. Déposition de frère Jean Pasquerel.
  2. Déposition de Spinal.