Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/372

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d’éloquence comme d’influence. Seul, dans la grande crise, il semblait n’avoir point désespéré du salut de la patrie. M. et Madame Roland, justement en proportion de leur grand courage, étaient mortifiés de n’avoir pas égalé l’audace de Danton au jour du péril, d’avoir été neutralisés, de n’avoir pu rien faire. C’était un malheur pour eux, pour la Gironde, il fallait s’en consoler. Et il fallait savoir aussi que sur l’homme qui fut plus heureux, qui resta debout dans l’abattement universel, il resterait toujours un sceau de gloire, de génie, de courage, que rien n’effacerait jamais. La France, quoi qu’il arrivât, n’abandonnerait pas l’héroïque gardien de sa fortune en péril, dans son plus terrible jour.

Danton avait dit le 21 septembre : « Dépouillons l’exagération… Consacrons la propriété. » Et le 25 il avait expressément désavoué Marat.

Il ne pouvait aller plus loin sans perdre la grande position où il pouvait le mieux servir, sauver la République, sa position d’avant-garde, son rôle de chef des violents. Il était trop heureux qu’il se trouvât un homme d’un si grand esprit pour remplir ce rôle, un homme qui, sous la violence des paroles et la gesticulation menaçante, gardât une tête politique prête à accueillir toute chose raisonnable. Il n’était nullement ennemi des Girondins et ne voulait point la guerre avec eux. Dès son premier discours, on l’a vu, il essaya de les ramener. C’était une occasion précieuse d’éloigner Danton de Robespierre. Un parti hors des partis se serait créé