Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/420

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commencé cette classe d’hommes, braves, honnêtes, irréprochables, dont parle le général Foy dans une page de ses Guerres de la péninsule, page précieuse, témoignage inestimable de la vérité la plus vraie, qui reste un titre pour la France :

« Nos officiers d’infanterie, dit-il, étaient l’honneur même, la vertu modeste, la résignation. L’idéal de ces braves gens, voués au devoir sans ambition, et qui n’ont du leur avancement qu’au temps, à la mort, fut l’excellent La Tour d’Auvergne, premier grenadier de la République, instructeur de l’armée d’Espagne. Ces officiers, comme on sait, si peu rétribués, quelques-uns mariés, suivis souvent à distance par leurs courageuses épouses qui ne voulaient pas les quitter, n’en ont pas moins montré un désintéressement, une délicatesse admirables, contenant par leurs exemples les tentations du soldat, et, sans murmure, versant leur sang dans plus d’une affaire meurtrière, qui souvent n’avait d’effet que d’enrichir les généraux de l’Empire. »

Ces honnêtes gens, à qui la Révolution venait d’ouvrir la carrière, lui étaient très attachés. Moins expansifs que le soldat, ils avaient pour la patrie un amour muet, austère, qui n’en était que plus profond. Gardiens jaloux de l’honneur de la France, ils s’efforçaient d’imprimer aux bandes jeunes, indisciplinées, qui leur arrivaient tous les jours, l’amour de l’ordre et du devoir. Ils réprimaient les excès, moins par leur autorité que par une censure grave et le froid mépris, quelquefois seulement par leurs