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ou la nuit), dans une maison de campagne, à quatre lieues de Paris, aux environs de Sceaux. Ce pays de bois était alors plus boisé qu’aujourd’hui et méritait le nom qu’un de ses cantons porte encore, Val-aux-Loups. Comment, si connu de visage, Danton sortait-il de Paris sans qu’on y fit attention ? Il est infiniment probable qu’il alla d’abord à Cachan, petit village sur la route, où put le recevoir Camille Desmoulins, chez sa belle-mère, la mère de Lucile, l’amie de Mme Danton.

L’influence de celle-ci, très forte sur Danton, fut pour beaucoup dans la démarche, si nous ne nous trompons. Danton aimait sa femme de passion et la voyait mourir. L’écrasante rapidité d’une telle Révolution lui jetait sur le cœur événement sur événement, brisait la pauvre femme. La réputation terrible de son mari, sa forfanterie épouvantable d’avoir fait septembre l’avait tuée. Elle était entrée tremblante dans ce fatal hôtel du ministère de la justice, et elle en sortit morte, je veux dire frappée à mort. Ce fut une ombre qui revint au petit appartement du passage du Commerce, dans la triste maison qui fait arcade et voûte entre le passage et la rue (triste elle-même) des Cordeliers ; c’est aujourd’hui la rue de l’École-de-Médecine.

Le coup était fort pour Danton. Il arrivait au point fatal où l’homme ayant accompli par la concentration de ses puissances l’œuvre principale de sa vie, son unité diminue, sa dualité reparaît. Le ressort de la volonté étant moins tendu, reviennent avec force la