Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 6.djvu/117

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palais, alla docilement rejoindre les trente Montagnards jacobins ou maratistes qui étaient restés dans la salle. La droite, qui avait fait la tête de la procession, devint la queue à son tour et rentra triste, vaincue.

Du banc des trente, sans quitter sa place, le cul-de-jatte Couthon parla d’une voix fort douce : « Maintenant, dit-il, vous voilà bien sûrs de votre liberté ; vous avez marché vers le peuple ; vous l’avez trouvé partout bon, généreux et sensible… Je demande, non pas encore un décret d’accusation… Non, seulement que les vingt-deux soient en arrestation chez eux, — et avec eux le comité des Douze, les ministres Clavières et Lebrun… »

Legendre demanda une exception dans les Douze, et Marat deux ou trois autres. Pendant qu’on lisait le décret, il disait : « Ajoutez ceci, retranchez cela… » Le lecteur ajoutait ou retranchait, sans consulter l’Assemblée. Le côté droit demandait qu’on votât, en faisant l’appel nominal, dans la pensée que plusieurs craindraient de se déshonorer. Cependant quelques-uns disaient : « Après tout, pour rester chez eux, ils ne seront pas fort à plaindre. » Et d’autres : « Un petit mal vaut mieux, pour éviter de grands maux. » Un autre, d’un air stoïque : « Il vaut mieux ne pas voter que de trahir son devoir. » Cette ouverture fut saisie. L’Assemblée ne vota point. La Montagne vota seule, pêle-mêle avec des gens du peuple qui s’étaient amicalement assis dans ses rangs.

Le décret prononcé à peine, un grand nombre