Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 6.djvu/30

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aurait fini par s’arrêter et se guillotiner lui-même.

Et plus que lui ! Billaud-Varennes ! le fantôme de la Terreur, et son véritable idéal. Il eut l’idée stupide que Billaud trahissait. Et ils se regardèrent, Billaud le comprit bien et lui jeta Danton, royal morceau, mais de digestion difficile, qui fut mortel à Robespierre.


La situation de Carnot, de Lindet, de Prieur, de La Vicomterie, etc., dans les deux comités, était horrible. Le dernier frémissait d’y être et avait peur de n’y pas être. Il se trouvait mal presque en voyant Robespierre. Carnot, Lindet, hommes si nécessaires, gardés par la victoire, n’étaient pas moins forcés de signer ces pièces sanglantes, qu’envoyaient Couthon et Saint-Just, et que lui-même Robespierre le plus souvent ne signait pas. Il est frivole (et même injurieux pour eux) de dire qu’ils ont signé sans lire des pièces si importantes. Disons les choses comme elles furent. S’ils avaient refusé, s’ils s’étaient retirés, la France eût été en péril. Sans leur mortel travail, leur sage direction, l’immense bavardage n’aurait guère servi. De plus, faut-il le dire ? ils étaient liés là par une affaire de cœur. Chacun alors sauvait ce qu’il pouvait. Osselin et Bazire, excellents Montagnards, périrent pour avoir sauvé des femmes effrayées, éplorées, qui se cachaient chez eux. Carnot aussi avait bien son péché ; il cachait des amis, très utiles à la République, l’illustre groupe d’officiers du génie qui avait renouvelé et honoré cette armée.