Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 6.djvu/373

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Il y avait deux partis à Toulon, les Girondins, les royalistes. Les premiers, faibles et violents, comme partout, prenaient des mesures contraires ; ils guillotinaient des patriotes et ils envoyaient de l’argent à l’armée de la République. Les seconds, plus conséquents, ne pouvaient manquer de les dominer ; ils appelèrent les Anglais. Ceux-ci, pris pour juges et arbitres entre les deux partis, jugèrent impartialement comme le juge de la fable ; ils donnèrent une écaille à chaque plaideur et s’adjugèrent Toulon.

Les représentants du peuple, Pierre Bayle et Beau vais, avaient été lâchement outragés par les modérés, qui leur firent faire une espèce d’amende honorable de rue en rue et à l’église, un cierge à la main. Traités plus barbarement encore sous la domination anglaise et jetés dans les cachots, ils y trouvèrent la mort. Beauvais y mourut de misère et de mauvais traitements ; Bayle abrégea en se poignardant.

Des gens moins légers que nos royalistes auraient contenu leur joie. Pour se frotter les mains de la ruine de la France, il fallait au moins qu’elle fût certaine. Ils n’y tinrent pas. Cette merveilleuse nouvelle des deux coups frappés en cadence sur Toulon, sur Dunkerque (ils tenaient l’un tout aussi sûr que l’autre), leur monta à la tête… Un monde de guerre et de marine raflé en quelques heures ! Lyon raffermi dans la révolte ! l’armée des Alpes compromise ! nos représentants forcés de marchander