Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 7.djvu/438

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sauver leurs ennemis… Enfin ils demandèrent de vivre.

Il y avait encore quelques constituants dans la Convention. L’existence de ces ruines primitives d’un ancien monde, restées là à travers tant de cataclysmes, était, sans nul doute, un miracle, le miracle de leur prudence qui leur permettait de voter si longtemps contre leur parti et le miracle aussi de la politique de Robespierre. Les plus connus étaient Sieyès, un vieillard, le canoniste gallican Durand de Maillane, l’avocat Boissy d’Anglas.

On les attaqua par l’humanité : « Pouvez-vous voir, leur dit-on, rouler par jour soixante ou quatre-vingts têtes à la guillotine ?… Arrêtons l’horrible charrette ! … » À quoi ils dirent froidement : « Mais qui l’a lancée ? c’est vous. »

Une seconde ambassade faisait valoir la justice.

« Une minorité minime opprime la République… Comptez les robespierristes. Ce parti finit faute d’hommes. Son jugement, c’est le désert qui se fait autour de lui. » En réalité, dès avril, on ne put renouveler la Commune qu’en descendant au plus bas, aux illettrés, aux inconnus. Quel embarras en prairial pour recruter le tribunal ! Au greffe de Fouquier-Tinville, il disait de ses greffiers : « Ils sont bons à guillotiner ; mais, après, où en trouver d’autres ? »

Tout cela faisait peu à la droite. Elle avait le temps pour elle, s’agrandissant chaque jour de la lassitude, de la défaillance, de la lâcheté publique.