Page:Michelet - Quinet - Des jésuites, 1843.djvu/188

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pour les grandes, qui avait fait autrefois sa vie. Lui qui, dans sa jeunesse, avait été emprisonné comme novateur, on l’entend répéter que, s’il vivait mille ans, il ne cesserait de crier contre les nouveautés qui s’introduisent dans la théologie, la philosophie, la grammaire. Il excelle dans la diplomatie, au point de ne rien laisser à inventer à ses successeurs. Son chef-d’œuvre à cet égard, fut de concilier sa toute-puissance avec celle de la papauté. Le pape voulait, malgré lui, créer cardinal, Borgia, un de ses disciples. Loyola décide que le pape offrira, que Borgia refusera, se ménageant ainsi l’orgueil du refus, et l’ostentation de l’humilité. Enfin, après avoir vu l’accomplissement de tout ce qu’il a projeté, la Société reconnue, les Exercices spirituels consacrés, la constitution promulguée, il touche à l’agonie, il dicte sa dernière pensée. Quelle est-elle ? « Ecrivez ; je désire que la compagnie sache mes dernières pensées sur la vertu d’obéissance ; » et ces dernières confidences, sont ces mots terribles, qui ont déjà été cités, et qui résument tout : que l’homme devienne tel qu’un cadavre, ut cadaver, sans mouvement, sans volonté ; qu’il soit tel que le bâton d’un vieillard, senis baculus, que l’on prend ou rejette à son gré.