Page:Michelet - Quinet - Des jésuites, 1843.djvu/267

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l’enthousiasme, de l’âme ; par où ils ont été conduits à se défier de ce qui est le principe et la source de tout cela, je veux dire, de l’idée même de Dieu. Dans la crainte qu’ils ont toujours eue de la grandeur réelle, ils devaient arriver à se faire une science athée, une métaphysique athée, qui, ne participant en rien de la vie, en eût néanmoins tous les simulacres. De là, après avoir retranché le but de la science, cet appareil de discussions, de thèses, de luttes intellectuelles, de combats de paroles, qui caractérisent l’éducation dans l’ordre de Jésus. Plus ils avaient ôté le sérieux à la pensée, plus ils conviaient les hommes à cette gymnastique, à cette escrime intellectuelle, qui couvraient le néant de la discussion. Ce n’étaient que spectacles, solennités[1], joutes d’académies, duels spirituels. Comment croire que la pensée ne fût pour rien au milieu de tant d’occupations littéraires, de rivalités artificielles, d’écrits échangés ? Ce fut là, le miracle de l’enseignement de la société de Jésus : attacher l’homme à d’immenses travaux qui ne pouvaient rien produire, l’amuser par la fumée, pour l’éloigner de la gloire, le rendre immobile au moment même, où il était abusé par toutes les apparences d’un mouvement littéraire et philosophique. Quand

  1. Solemniorem disputationem.