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Page:Mickiewicz - Thadée Soplitza, trad. Gasztowtt.pdf/99

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Mais son ventre en avait déjà reçu beaucoup ,
Presque tous les fusils avaient même calibre :
De se dire vainqueur chacun d’eux restait libre.

C’en est trop, dirent-ils ; il est temps d’en finir.
Que ce soit Diable ou Dieu qui veuille nous unir,
Séparons-nous. C’est trop de deux soleils au monde ! »
Ils dégainent : chacun cherche qui le seconde.
Deux hommes si charmants ! On voudrait les calmer,
Mais on ne réussit qu’à les mieux enflammer :
Et c’est au pistolet qu’ils confient leur vengeance.

« Ils sont prêts. Nous crions : « Éloignez la distance ! »
— « C’est ainsi, disent-ils ; eh bien ! nous tirerons
Des deux bouts d’une peau d’ourse, nous le jurons.
Hreczech, assistez-nous ! » Je prends air féroce :
Bien, dis-je, mais d’abord que l’on creuse une fosse !
Vous ne finirez pas ceci sans vous toucher.
Mais je ne permets pas un duel de boucher.
Si vous voulez tirer, mettez quelque chose entre.
On ne peut s’appuyer le canon sur le ventre,
Morbleu ! Je vous permets déjà le pistolet.
La distance sera, puisque cela vous plaît,
Une peau d’ourse, et moi je l’étendrai par terre ;
Puisque je suis témoin, j’en ferai mon affaire ;
Et je vous placerai, vous, Monsieur, d’un côté,
Près de la tête, et vous à l’autre extrémité.
disent-ils ; le jour ? — Demain. — L’endroit ? — Dans
— Soit, disent-ils ; le jour ? — Demain. — L’endroit ? — Dans l’Ile. »

« On se sépare, et moi je cherche mon Virgile. »
Il s’interrompt. Quelqu’un crie : « Hare ! » Entre leurs pieds
Part un lièvre… après lui courent les lévriers.
L’Écourté, le Faucon, chacun avec son maître,
Sont là, car on s’est dit : ils serviront peut-être.
Ils suivaient les chasseurs tous deux en liberté.
Quand ils ont vu le lièvre, ils ont tous deux sauté.
Leurs maîtres à cheval s’élançaient déjà vite,
Mais le Woïski cria « Halte pas de poursuite !
Nul ne doit avancer d’un pas ; je le défends.
Nous voyons tout d’ici ; le lièvre prend les champs. »
En effet, entendant le bruit des chiens, le lièvre
Courait dressant l’oreille et frissonnant de fièvre ;
Tout gris, il s’allongeait au-dessus des sillons ;
Et ses pattes semblaient, comme quatre bâtons