Page:Millevoye - Œuvres complètes de Millevoye, I, 1837, éd. Pongerville.djvu/69

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Un languissant sourire... et moi,
Voyant son calme avec effroi,
Avant l’heure d’hymen, je pleurais mon veuvage.
Mais sur ce vert rocher qui s’élève à l’écart,
Entre le bois et la colline,
N’ai-je pas entendu la clochette argentine
De la chèvre errant au hasard ?
J’approche... souvenir ! c’est elle
Qui mêlant ses secours aux vains secours de l’art,
Dans un sein desséché répandait, mais trop tard,
Les doux trésors de sa mamelle.
Garde ton lait, chèvre fidèle,
Un jour, hélas ! ce jour peut-être n’est pas loin,
De tes bienfaits aussi ma vie aura besoin,
Et tu feras pour moi ce que tu fis pour elle.
Mais la nuit vient : déjà ses voiles étendus
Enveloppent les cieux plus sombres,
Et mon regard encor cherche à travers les ombres
Cette triste demeure, où l’on ne m’attend plus.




LE BOIS DETRUIT.


Nymphes, pleurez ! Pleurez : l’antique bois
De son enceinte a perdu le mystère.
Pleurez, Amours ! le chêne solitaire
Vous a voilés pour la dernière fois.
Je n’entends plus sous les vertes allées
Des passereaux les joyeuses volées.
De ce séjour hôtes charmants et doux,
Est-il aussi des proscrits parmi vous ?
Le voyageur, trompé dans son attente,
Redouble en vain sa marche haletante,
Implore en vain contre les feux du jour
L’ombrage épais, disparu sans retour.