Page:Mirabeau - Hic et Hec, 1968.djvu/16

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fustigeai si vertement qu’il versa des larmes de plaisir.

Dès ce moment la confiance s’établit ; il prétexta un rhume qui le mettait dans la nécessité d’avoir quelqu’un auprès de lui, et il fit mettre mon lit dans un petit cabinet qui touchait au sien ; mais ce n’était que pour la forme, et, dès qu’il était couché, il m’appelait et j’allais dormir ou veiller dans ses bras. Il fut mon Socrate et je fus son Alcibiade. Tour à tour agent et patient, il mit sa gloire à perfectionner mon éducation.

Ma quatorzième année finie, je possédais le grec, le latin, un commencement de logique et de philosophie, je connaissais les premiers éléments de la théologie.

Mais pour approfondir cette science qui tant de fois aiguisa les poignards du fanatisme, il fallait passer dans d’autres mains, le père Natophile étant livré presque exclusivement à la belle littérature, et je fus obligé d’aller étudier sous le professeur Aconite.

Je gardai néanmoins mon lit chez Natophile, qui, sentant que pour faire mon chemin dans cette nouvelle carrière je serais obligé d’avoir les mêmes complaisances pour Aconite, le prévint en ma faveur, et dressa lui-même les articles du traité de partage ; il fallait le consentement du supérieur pour mon admission au cours de théologie. Natophile me présenta chez lui, ma figure lui plut, et il fallut bien lui payer son droit.

Pendant l’année qui suivit, je passai les jours