Page:Mirabeau - Hic et Hec, 1968.djvu/21

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Et brandissant celui qu’il tenait, il me montrait celui dont Jupiter frappait Ganymède. L’amour de la vie ne rendit pas mon choix douteux ; je cédai à l’impérieuse circonstance, et Mme Valbouillant, trop heureuse d’en être quitte à si bon marché, me retint assujetti dans la position où je me trouvais ; son mari devint le mien, et dans le fort de ses transports, il prodiguait mille baisers à sa femme, bénissant une infidélité qui lui procurait de si douces jouissances.

— Tu me pardonnes donc, lui dit-elle en l’embrassant.

— Comment rester fâché contre de si chers coupables ? Ce sein, dit-il en le baisant (elle l’avait superbe), et ces jumelles, ajouta-t-il en frottant de la main l’autel où il venait de sacrifier, attendriraient un tigre ; de plus, je n’ai pas compté que tu pusses rester fidèle pendant une si longue absence. J’ai gagné dans mon voyage une bonne succession et des cornes. La première me fait plus de bien que les autres ne me feront de mal. Ne prêtons point à rire, soyons discrets et jouissons sans scrupule de tous les plaisirs que notre âge et notre fortune nous offrent ; évitons le scandale et moquons-nous du reste.

Mme Valbouillant, enchantée de la manière dont il avalait la pilule, le comblait de caresses.

— Ah ! mon ami, que de bonté ! Non, plus jamais tu n’auras de reproche à me faire ! Je renonce…

— Tais-toi, point de serment, je n’y crois point. J’exige ta confiance et non ta fidélité ; ce serait demander l’impossible. Tiens, regarde