Page:Mirabeau - Hic et Hec, 1968.djvu/55

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il fut donc arrêté que je me rendrais auprès de Sa Grandeur et que je ferais mes efforts pour m’échapper souvent et jouir avec eux des plaisirs que je leur avais fait connaître. Je ne répondis donc point à la lettre du prélat ; je m’habillai avec soin, et les yeux baissés, le front modeste, je me rendis chez le saint homme. Dès qu’il me vit, d’un air grave il me dit de passer dans son cabinet intérieur ; et se hâtant de se débarrasser du promoteur et de l’official qui l’entretenaient de quelques affaires de diocèse, il vint me rejoindre, ayant défendu qu’on l’interrompît avant qu’il sonnât. Dès que nous fûmes seuls, son visage perdit toute sa gravité épiscopale, il m’embrassa avec transport :

— Eh bien, mon ami ! mon cher Hic et Hec, me dit-il, nous vivrons donc ensemble, n’y consentez-vous pas ?

— Les désirs de Monseigneur sont des ordres pour moi.

— Bon, entrez donc en exercice de vos fonctions de lecteur.

Il me remet la satire de Pétrone, ouverte à l’endroit qui a fourni la jolie scène des amours d’été, me fait prosterner sur une pile de carreaux, et pendant que je lis, réalise avec moi la scène dont il entend le récit ; il la pousse jusqu’au dénoûement, et prenant ensuite le livre, il se met à ma place et je lui dis que je sais aussi bien attaquer que soutenir l’assaut ; nous nous rajustons et nous approchant d’un bureau, sur lequel étaient amoncelés plusieurs casuistes, il me fait asseoir, sonne, et dit au valet de chambre qui