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LE RIDEAU LEVÉ


te procurais, tu ne pus recommencer d’en faire usage. Tu m’en fis, à ton retour, des plaintes amères ; tu n’osais me demander de servir encore ta maladresse ; j’apercevais à quel point tu le désirais ; tu me pressais, tu me conjurais de ne plus te quitter. Tu voulus, cruelle amie, que je fusse témoin de tes plaisirs et de ta félicité, pendant que la mienne était perdue pour toujours. Il fallut que ma complaisance et mon amitié pour toi me sollicitassent encore de t’offrir de nouveaux secours ; mes offres t’enchantèrent ; tu m’accablas de caresses et de baisers ; je te fis penser, en cet instant, à te munir de l’éponge salutaire, et tu m’entraînas pour être présente à vos transports et au bonheur dont vous jouissiez. Toi-même me fis voir le dieu que portait Valsay, ce dieu que tu chérissais, avec lequel tu badinais, et dont il m’avait, dès la première fois, fait sentir la présence ; tu ajoutais de jour en jour à tes folies ; tu lui découvrais mes tétons et tout ce que j’avais de plus caché ; je me prêtai à ton badinage ; tu les lui faisais toucher. Dans quel état et dans quelle émotion me mettiez-vous tous deux ! Je te le disais à l’oreille, et la pitié perfide te faisait révéler mon secret. Tu voulais me faire jouir de ton amant ; tu lui souhaitais mes faveurs ; tu me pressais de les lui accorder ; tu voulais enfin me porter à la place que tu avais occupée ; ton aveu, tes empressements et ses désirs, dont tu mettais entre