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LE RIDEAU LEVÉ


mettre dans son lit. Surprise de cet arrangement nouveau, ma curiosité fut à l’instant réveillée. Je me relevai un moment après, et courus d’un pas léger à la porte vitrée, où j’écartai le bord du rideau. Je fus bien étonnée de voir toute la gorge de Lucette entièrement découverte. Quel sein charmant ! Deux demi-globes d’une blancheur de neige, du milieu desquels sortaient deux fraises naissantes, d’une couleur de chair plus animée, reposaient sur sa poitrine ; fermes comme l’ivoire, ils n’avaient de mouvement que celui de sa respiration. Mon père les regardait, les maniait, les baisait et les suçait ; rien ne la réveillait. Bientôt il lui ôta tous ses habits, et la porta sur le bord du lit qui était en face de la porte où j’étais. Il releva sa chemise : je vis deux cuisses d’albâtre, rondes et potelées, qu’il écarta ; j’aperçus alors une petite fente vermeille, garnie d’un poil fort brun ; il l’entr’ouvrit, il y posa les doigts, en remuant la main avec activité : rien ne la retirait de sa léthargie. Animée par cette vue, instruite par l’exemple, j’imitai sur la mienne les mouvements que je voyais. J’éprouvai une sensation qui m’était inconnue. Mon père la coucha dans le lit et vint à la porte vitrée pour la fermer. Je me sauvai, et courus m’enfoncer dans celui où il m’avait mise. Aussitôt que j’y fus étendue, profitant des lumières que je venais d’acquérir, et réfléchissant sur ce que j’avais vu,

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