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LE RIDEAU LEVÉ


les glaces avec une complaisance satisfaite, un contentement singulier. Je paraissais d’une blancheur éblouissante ; mes petits tétons, si jeunes encore, s’élevaient sur mon sein comme deux demi-boules parfaitement rondes, relevées de deux petits boutons d’une couleur de chair rose ; un duvet clair ombrageait une jolie motte grasse et rebondie, qui, faiblement entr’ouverte, laissait apercevoir un bout de clitoris semblable à celui d’une langue entre deux lèvres : il appelait le plaisir et la volupté. Une taille fine et bien prise, un pied mignon surmonté d’une jambe déliée et d’une cuisse arrondie, des fesses dont les pommettes étaient légèrement colorées, des épaules, un col, une chute de reins charmante et la fraîcheur d’Hébé ! Non, l’Amour ne m’eût rien disputé, s’il eût été de mon sexe. Tels étaient les éloges que Lucette et mon papa faisaient à l’envi de ma personne. Je nageais dans la joie et l’ivresse de l’amour-propre. Plus je me croyais bien, plus ils me trouvaient telle, et plus j’étais enchantée que ce papa, si cher à mon cœur, eût une entière jouissance de tout ce que je possédais. Il m’examinait, il m’admirait ; ses mains, ses lèvres ardentes se portaient sur toutes les parties de mon corps ; nous avions l’un et l’autre l’ardeur de deux jeunes amants qui n’ont rencontré que des obstacles, et qui vont enfin jouir du prix de leur attente et de leur amour.

Je souhaitais vivement le voir dans l’état