Page:Mirbeau - Les Écrivains (deuxième série).djvu/118

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ne vous révolterez ni contre votre maître d’études, ni contre votre admiration, ni contre vous-même, parce que vous êtes un bon vieux petit garçon, un bon vieux petit élève, bien gentil, bien sage, bien discipliné, et qu’il serait malséant que vous quittiez, à la promenade, le morne troupeau de vos camarades de pensum, que vous sortiez des rangs pour aller respirer le parfum d’une belle fleur qui poussa librement sur le talus de la route… Et il faut bien, puisque vous m’y obligez, que je m’explique sur M. Ernest La Jeunesse, dont, malgré vos affirmations et vos informations, je n’ai jamais rien écrit, pas même le nom, et sur ses livres, à propos desquels vous me reprochez — avec quelle hautaine protestation ! — un enthousiasme propagandiste qui n’avait pas eu l’occasion de se manifester et de s’exprimer, jusqu’ici.

Si je n’ai pas parlé de M. Ernest La Jeunesse, ce ne fut ni par indifférence, ni parce que ses livres ne m’intéressèrent point. Bien au contraire. Parmi les productions littéraires courantes, où c’est presque toujours le même livre qui reparaît — et cruel figurant — sous des titres et avec des signatures variés, celui de M. Ernest La Jeunesse, je l’accueillis comme quelque chose d’autre et de nouveau, en quoi je voyais se dessiner, nettement, un beau tempérament d’écrivain, une intelligence curieuse et ardente ; mais on n’a jamais le temps de faire ce que l’on voudrait faire et qui vous tient le plus à cœur.