Page:Mirbeau - Théâtre III.djvu/136

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Courtin

Allons donc !

Arnaud Tripier

Un député… un ancien ministre… (Insistant.) un des leurs !… eh bien, ils l’ont exécuté sans pitié… exécuté…

Courtin

C’était justice !… Un escroc, je vous dis…

Arnaud Tripier

Oh ! monsieur le baron, quand on veut perdre un homme !

Courtin, criant et marchant, et se bouchant les oreilles.

Je ne suis pas un Leverrier… Je ne suis pas Leverrier… Vous m’insultez !… je ne suis pas Leverrier.

Arnaud Tripier

Excusez-moi ! Mais ce pauvre Leverrier était un ami. Tenez, j’ai déjeuné avec lui la veille de son arrestation, oui, la veille de son arrestation. (Un temps.) Trois semaines après il passait en correctionnelle…

Courtin

Vous êtes fou ! Vous êtes fou ! Vous ne savez pas ce que vous dites.

Malgré ses efforts, il chancelle un peu et se retient au dossier d’un fauteuil.

Arnaud Tripier, revenant pour le soutenir.

Monsieur le baron.

Courtin, le repoussant, la voix un peu étranglée.

Ce n’est rien ! une faiblesse !… J’ai eu une journée fatigante. Je n’ai pas déjeuné. Je suis fatigué, très fatigué. Laissez-moi, allez-vous-en.