Dieu sait ce que d’abord tout le monde en croirait ;
À pure politique on me l’imputerait :
Et l’on dirait partout que, me sentant coupable,
Je feins, pour qui m’accuse, un zèle charitable ;
Que mon cœur l’appréhende, et veut le ménager
Pour le pouvoir, sous main, au silence engager.
Et toutes vos raisons, monsieur, sont trop tirées.
Des intérêts du ciel pourquoi vous chargez-vous ?
Pour punir le coupable, a-t-il besoin de nous ?
Laissez-lui, laissez-lui le soin de ses vengeances,
Ne songez qu’au pardon qu’il prescrit des offenses,
Et ne regardez point aux jugements humains,
Quand vous suivez du ciel les ordres souverains.
Quoi ! le faible intérêt de ce qu’on pourra croire
D’une bonne action empêchera la gloire ?
Non, non ; faisons toujours ce que le ciel prescrit,
Et d’aucun autre soin ne nous brouillons l’esprit.
Mais, après le scandale et l’affront d’aujourd’hui,
Le ciel n’ordonne pas que je vive avec lui.
À ce qu’un pur caprice à son père conseille ?
Et d’accepter le don qui vous est fait d’un bien
Où le droit vous oblige à ne prétendre rien ?
Que ce soit un effet d’une âme intéressée.
Tous les biens de ce monde ont pour moi peu d’appas,
De leur éclat trompeur je ne m’éblouis pas :
Et si je me résous à recevoir du père
Cette donation qu’il a voulu me faire,
Ce n’est, à dire vrai, que parce que je crains
Que tout ce bien ne tombe en de méchantes mains ;
Qu’il ne trouve des gens qui, l’ayant en partage,
En fassent dans le monde un criminel usage,