Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 2.djvu/509

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Cléanthis
Tu ne te souviens point du tout de la manière
Dont tu m’as su traiter, étant venu du port ?

Sosie
Non plus que rien. Tu peux m’en faire le rapport :
Je suis équitable et sincère,
Et me condamnerai moi-même, si j’ai tort.

Cléanthis
Comment ? Amphitryon m’ayant su disposer,
Jusqu’à ce que tu vins j’avais poussé ma veille ;
Mais je ne vis jamais une froideur pareille :
De ta femme il fallut moi-même t’aviser ;
Et lorsque je fus te baiser,
Tu détournas le nez, et me donnas l’oreille.

Sosie
Bon !

Cléanthis
Bon ! Comment, bon ?

Sosie
Bon ! Comment, bon ?.Mon Dieu ! tu ne sais pas pourquoi,
Cléanthis, je tiens ce langage :
J’avais mangé de l’ail, et fis en homme sage
De détourner un peu mon haleine de toi.

Cléanthis
Je te sus exprimer des tendresses de cœur ;
Mais à tous mes discours tu fus comme une souche ;
Et jamais un mot de douceur
Ne te put sortir de la bouche.

Sosie
Courage !

Cléanthis
Courage ! Enfin ma flamme eut beau s’émanciper,
Sa chaste ardeur en toi ne trouva rien que glace ;
Et dans un tel retour, je te vis la tromper,
Jusqu’à faire refus de prendre au lit la place
Que les lois de l’hymen t’obligent d’occuper.

Sosie
Quoi ? je ne couchai point.…

Cléanthis
Quoi ? je ne couchai point.