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SA VIE, SON ŒUVRE


relâche, à avoir des idées neuves et m’a généreusement offert son concours — presque sa collaboration.


Samedi. — J’ai été ce soir aux Champs-Élysées. Il existe deux superbes cafés devant lesquels, sur une estrade élégante, des musiciens et des musiciennes exécutent des concerts en plein vent, à grand orchestre. Les chanteuses sont en robe de gaze et en cheveux, avec un bouquet à la main. Les chanteurs débitent des chansonnettes comiques avec le costume analogue. Ou varie par des chœurs de pécheurs et de contrebandiers, dans le genre de celui-ci que j’ai retenu :


Amis, courage,
À l’abordage,
Élançons-nous !
Et que je meure
Si tout à l’heure
Cette galère
N’est pas à nous.


La rime exigerait galeure, mais le chanteur par sa prononciation s’efforce de la faire respecter.

En général, les Parisiennes de la rue — je n’ai vu ni Mabille ni le faubourg Saint-Germain — sont moins jolies que les Bordelaises, ont moins de coquetterie et moins de tournure. En revanche, et cela te surprendra, elles paraissent beaucoup plus modestes et retenues que tes chères compatriotes. Peut-être mes opinions se modifieront-elles par la suite, mais je te dis mes premières impressions — et j’ai déjà huit jours de Paris.

Du reste, j’ai dû beaucoup rabattre de mes idées sur la foule et le bruit que je comptais y trouver. J’habite le quartier le plus central, et à onze heures et demie y régnent le calme et la solitude la plus complète. C’est désolant. Bonsoir, mon pauvre ami, il est dix heures et je me couche.


Dimanche. — Quelle surprise en voyant arriver ce matin la mère M*** qui vient me supplier, toute la famille ayant été