Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/104

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Les applaudissements duraient encore. Mme d’Ingrande ne cacha pas un mouvement d’humeur, et elle se retourna vers Irénée. Irénée avait disparu ; il ne lui était plus possible de voir Marianna, il ne lui était plus possible surtout de l’entendre. Il était sorti, autant pour la fuir que pour songer aux moyens de se dégager vis-à-vis de Philippe Beyle, selon la promesse qu’elle venait de lui arracher. Restaient M. Blanchard et la marquise de Pressigny. Mais, en outre de l’instinctive répulsion que la comtesse d’Ingrande éprouvait pour cet inconnu, il était en ce moment engagé dans une conversation tellement intime avec la marquise, qu’elle ne jugea pas à propos de les déranger. M. Blanchard parlait très bas, et la marquise de Pressigny l’écoutait avec une expression marquée d’intérêt et d’inquiétude.

— Madame, avait-il commencé par lui dire, je viens de faire cent soixante lieues pour vous rencontrer.

— Moi, monsieur ?

— Oui, madame.

— Si je comprends bien ce marivaudage de maître de poste, cela veut dire que vous venez de Paris.

— D’un peu plus loin… de Saint-Denis.

— De Saint-Denis ? murmura la marquise étonnée.

— Il y a trois semaines, j’étais au chevet d’une personne dont les journaux vous ont sans doute appris la fin sinistre.

— De quelle personne voulez-vous parler, monsieur ?

— De Mme Abadie.

— Mme Abadie… répéta la marquise en se troublant un peu ; qu’est-ce qui vous fait supposer que je connaissais cette femme ?

— Une chose bien simple : un message dont elle m’a chargé pour vous.

— Parlez plus bas ! dit vivement la marquise de Pressigny.

— En effet, les plus grandes précautions m’ont été recommandées ; voilà pourquoi j’ai choisi ce lieu et cette foule, pensant que je courais moins le risque d’y être épié que partout ailleurs.

— Et… ce message ?