Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/206

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Un léger mouvement des sourcils décela une sensation de surprise chez la comtesse. Cela n’alla pas plus loin. Philippe sortit avec la dignité d’un ambassadeur qui reçoit ses passeports.

Ni lui ni la comtesse ne se doutaient que leur conversation venait d’être entendue par Amélie. Enfermée dans un cabinet dont la seconde issue avait été récemment condamnée, la jeune fille s’était trouvée involontairement dans la nécessité d’assister à des révélations d’une nature nouvelle et pénible pour elle. Pour la première fois, elle apprit la véritable situation de son père, et son cœur se révolta au refus prononcé par la comtesse. En revanche, sa reconnaissance pour Philippe Beyle s’accrut considérablement.

Dans l’appartement du premier étage, où elle se hâta de remonter au bout de quelques minutes, Amélie trouva sa mère en proie à une irritation fébrile, mais muette. La marquise de Pressigny était assise non loin d’elle. L’une et l’autre avaient peu changé depuis deux ans ; toutefois un observateur aurait pu constater que Mme d’Ingrande était devenue plus sévère et Mme de Pressigny plus affable.

Après que quelques visites se furent succédé, la comtesse s’adressa à sa sœur.

— Savez-vous, lui dit-elle, qui a eu l’audace de se présenter tout à l’heure chez moi ?

— Qui donc ?

— Le meurtrier de ce pauvre Irénée de Trémeleu.

— Le meurtrier !

— Monsieur de Trémeleu n’est pas mort !

Ces deux protestations furent lancées à la fois par Amélie et par la marquise.

— S’il n’est pas mort, il n’en vaut guère mieux, reprit la comtesse ; il est malade des suites de sa blessure, et les médecins osent à peine espérer une guérison complète.

— Le combat qui eut lieu entre ces deux messieurs ne fut-il pas loyal, ma mère ? demanda Amélie.