Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/279

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à des mœurs qu’elle aurait dû toujours ignorer ; c’était la révélation d’antécédents condamnés à demeurer éternellement ensevelis dans l’ombre. « Je sais jouer l’amour ! » Ces mots l’importunaient douloureusement ; elle avait besoin pour les chasser de se rappeler les protestations et les serments de Philippe.

Les autres lettres n’étaient que la reproduction de la même idée ; selon la condition et la femme, la paraphrase s’ennoblissait ou se compromettait davantage ; les masques étaient différents, la physionomie était immuable. Dans un de ces messages il allait jusqu’à railler le réchaud qu’une petite modiste menaçait d’allumer dans son arrière-magasin.

Amélie crut devoir ne pas informer Philippe de cet incident ; elle garda sa blessure pour elle seule. D’ailleurs, rien dans cette découverte n’avait encore entamé son amour.

Elle reçut d’autres lettres ; elle les lut comme elle avait lu les premières ; chacune d’elles venait éclairer de funestes lueurs la jeunesse de son mari et apporter un démenti à ses effusions les plus récentes. Lorsque Philippe lui avait dit la veille, en l’éblouissant de son beau regard : « Aimer et être aimé ! toute la vie est dans ces mots ! » voici ce qu’Amélie lisait le lendemain, dans un ancien billet déposé sur sa table de toilette ou rencontré à ses pieds dans une allée du jardin :

« La vie est dans tout, excepté dans l’amour. L’amour est une sensation confuse, comme le sommeil, et qui annule toutes les autres sensations. Un homme qui cesse d’aimer est un homme qui se réveille. Bonjour, madame ! »

En dépit de sa tendresse et de sa confiance, on comprend que le doute dut finir par ébranler l’esprit d’Amélie. Une dernière attaque de ce genre lui fit prendre une résolution. Elle avait trouvé, un matin, dans un bouquet que lui envoyait Philippe, une lettre qu’il n’y avait certainement pas