Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/367

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Seule, toute seule, voici Mlle Piquaret, blonde fille, majeure, mince et longue, et dont les pieds seuls semblent toucher la terre. Une strophe de M. de Laprade n’est pas plus diaphane, une grisaille antique n’est pas plus silencieuse. Elle ne parle qu’à la condition de rêver, elle ne rêve qu’à la condition de dormir, car elle est somnambule et somnambule extralucide. Mais les oracles qu’elle rend dans son quartier sont presque toujours dictés par des voix et des intérêts maçonniques.

Mme Guillermy est une épaisse bourgeoise de cinquante trois ans, amplement vêtue ou plutôt couverte, selon son expression. Sa figure, mélange d’importance et de bonté, rehaussée par de hauts cheveux gris bouffants, accuse une de ces commerçantes estimables, telles que le quartier des Bourdonnais en offre, assises derrière le grillage d’un comptoir et gravement inclinées soir et matin sur un registre aux angles de cuivre.

Mme Guillermy est l’honneur de la Franc-maçonnerie des femmes. Sa vie est un exemple de travail continuel, de maternité majestueuse et tendre. Elle ne s’est jamais servie de son pouvoir que pour pratiquer le bien, faire des mariages et empêcher quelques ruines ; aussi sa parole un peu brève, son regard quelquefois sévère ne trompent-ils personne. De l’ancienne Arche-Pépin à la rue Saint-Honoré, en passant par le pays de la rue Saint-Denis, on la révère et on l’aime.

Faut-il la nommer celle-là, cette brune, cette audacieuse, dont, la robe fait un bruit, dont les yeux dardent un feu ?