Page:Monselet - La Franc-maçonnerie des femmes, 1861.djvu/55

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Marianna n’avait pas encore ouvert les yeux. Le jeune homme qui l’accompagnait la prit dans ses bras avec précaution, aidé du second rameur. Lorsqu’il eut touché terre, il se trouva face à face avec Irénée. Il s’arrêta.

— Vous ici, monsieur ! dit-il.

— Ne vous attendiez-vous donc plus à me revoir ? répondit Irénée.

— Le moment et le lieu seraient mal choisi pour une discussion, vous le comprenez : je ne doute pas que vous ne me fournissiez l’honneur d’une prochaine rencontre. À bientôt, monsieur, à bientôt.

— Et si la vie de Marianna est en danger, malheur à vous ! lui cria Irénée.

Le jeune homme allait répliquer ; mais rappelé aux devoirs de sa situation par un mouvement de Marianna, il se dirigea promptement vers l’hôtel avec son fardeau. M. Blanchard avait comprimé le bras d’Irénée, en lui recommandant la prudence. Mais sa recommandation arrivait trop tard : placée dans la seconde barque, madame d’Ingrande, la marquise de Pressigny et Amélie avaient assisté à cette scène rapide ; et si les paroles n’étaient point parvenues jusqu’à leurs oreilles, du moins aucun des mouvements, aucun des gestes des deux interlocuteurs n’avait été perdu pour leurs yeux.

— Ma sœur, commencez-vous à être convaincue ? murmura la marquise à l’oreille de madame d’Ingrande.

Celle-ci ne répondit point. Malgré son trouble, Irénée comprit qu’il ne pouvait se dispenser, sans manquer aux convenances, d’aller saluer la comtesse et de féliciter Amélie sur le courage qu’elle venait de déployer. C’est ce qu’il fit avec une gaucherie et un malaise qui n’échappèrent pas aux trois femmes. Il termina en leur demandant si elles ne comptaient pas mettre pied à terre.

— Non, répondit la comtesse ; il nous suffit de savoir que