Page:Monselet - Les Aveux d’un pamphlétaire, 1854.djvu/78

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J’allai à la cheminée et trouvai l’ordonnance sous un flambeau. Je la lus à voix basse : c’était, comme d’habitude, de la volaille, du vin de Bordeaux, des biscuits, avec des sirops pour le soir et des bouillons pour la matinée. Évidemment mon petit écu ne pouvait suffire à cette dépense ; un mouvement de mauvaise humeur m’échappa.

— Rondel se moque du monde ! dis-je entre mes dents.

— Qu’est-ce qu’il y a ? interrogea Denise, avec cet éternel sourire qui me déchirait.

— Rien, rien… répondis-je en pliant l’ordonnance et en la mettant dans ma poche.

Mais les malades ont une clairvoyance extrême. Elle lut dans mon geste, et, suivant la même filière d’idées que moi, elle arriva en même tempsà la même décision.

— Est-ce que vous n’allez pas ce soir à l’académie de la rue du Chaume ?

L’académie de la rue du Chaume était un tripot où j’avais coutume d’aller tenter la fortune ; mais ce soir, avec un écu pour enjeu, que pouvais-je espérer ? Et puis, devais-je exposer cette ressource unique ?