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iii
PRÉFACE.

logies de manière et de tempérament nous ont paru nombreuses. Excès de naïveté ou de préciosité, tout, dans l’une et l’autre œuvre, est empreint du même cachet national. Pastellistes de cuisinières, romanciers d’alcôve, graveurs de courtilles, ils disent bien les mœurs de leur époque, surtout les mœurs d’exception, et ils ont cette qualité énorme, la vie, qui fait parfois défaut aux grands maîtres.

Ces auteurs sont surtout des hommes avant d’être des auteurs ; la préoccupation du public n’est que secondaire chez eux, et tout est bien dès qu’ils sont satisfaits. Ils maltraitent le style pour arriver à l’effet plus rapidement. Déjà déconsidérés dans leur temps, on ne s’étonne pas s’ils disparaissent complètement sous l’Empire, refoulés par les pâles restaurateurs du bon goût. Il fallait une époque comme la nôtre, dégagée de toute rhétorique, idolâtre d’individualisme, interrogeant l’art avec des yeux avides et agrandis, pour venir réveiller leur mémoire, remettre leur talent en question, et leur restituer une part d’influence dans le passé aussi bien que dans le présent.

Peut-être nous reprochera-t-on, malgré cela, de n’avoir pas repoussé à coups d’aviron quelques-unes des ombres informes qui se cramponnaient à notre barque. Si Linguet, si Mercier rencontrent une certaine indulgence, les autres courent le risque d’être rejetés une seconde fois par l’opinion. Cela ne nous