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OLYMPE DE GOUGES.

À l’époque où la barre de l’Assemblée nationale était ouverte à tout le monde, Olympe de Gouges ne manqua pas de s’y présenter. — Elle écrivit, en outre, au président pour lui demander la faveur de défendre Louis XVI. Sa lettre fut lue par un secrétaire dans la séance du 15 décembre 1792, et insérée au Moniteur du 17 ; elle excita l’étonnement et quelquefois l’hilarité :

« Citoyen président, je m’offre, après le courageux Malesherbes, pour être le défenseur de Louis. Laissons à part mon sexe : l’héroïsme et la générosité sont aussi le partage des femmes, et la Révolution en offre plus d’un exemple. Je suis franche et loyale républicaine, sans tache et sans reproche ; personne n’en doute, pas même ceux qui feignent de méconnaître mes vertus civiques ; je puis donc me charger de cette cause.

« Je crois Louis fautif comme roi ; mais dépouillé de ce titre proscrit, il cesse d’être coupable aux yeux de la République. Ses ancêtres avaient comblé la mesure des maux de la France ; malheureusement la coupe s’est brisée dans ses mains, et tous les éclats ont rejailli sur sa tête. Je pourrais ajouter que, sans la perversité de la cour, il eût été peut-être un roi vertueux. Je désire d’être admise par la Convention nationale et par Louis Capet à seconder un vieillard de près de quatre-vingts années dans une fonction pénible, qui me paraît digne de toute la force et de tout le courage d’un âge vert. Sans doute je ne serais point entrée en lice avec un tel défenseur, si la cruauté aussi froide qu’égoïste du sieur Target n’avait enflammé mon héroïsme et excité ma sensibi-