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OUBLIÉS ET DÉDAIGNÉS.

le Père, c’est le roi ; le Fils, c’est le peuple ; le Saint-Esprit, c’est la loi.

Mais le théâtre ne donnant pas à Olympe de Gouges la renommée dont elle avait soif, elle en revint à ses interpellations politiques. Elle tourna sa haine contre Robespierre.

Pendant quelques jours, celui-ci feignit de ne pas lire ses sarcasmes. Elle publia une brochure intitulée : Pronostic sur M. Robespierre. Il laissa passer ce factum impuni. Elle s’offensa du peu de cas qu’il semblait en faire, et elle livra à l’impression une lettre dont j’extrais le passage suivant :

« C’est moi, Maximilien, qui suis l’auteur de ton Pronostic ; moi, te dis-je, Olympe de Gouges, plus homme que femme ! Tu donnerais, dis-tu, ta vie pour concourir à la gloire et au bonheur de notre commune patrie ? Eh bien, voyons : tu connais le trait de ce jeune Romain qui se précipita dans un gouffre pour calmer les passions et rétablir la paix de la République. Robespierre, auras-tu le courage de m’imiter ? Précipitons-nous dans la Seine ! Tu as besoin d’un bain pour laver les taches dont tu t’es couvert depuis le 10 ; ta mort calmera les esprits, et, quant à moi, le sacrifice d’une vie pure désarmera le ciel. Je suis utile à mon pays, tu le sais ; mais ton trépas le délivrera du plus grand des fléaux, peut-être ne l’aurai-je jamais mieux servi !… »

Ainsi, elle s’imaginait que ce duel à la Seine n’avait rien que de très-acceptable.

Traduite devant le Tribunal révolutionnaire, elle montra dans sa défense du courage et de la présence